Aujourd’hui, nous employons, moi y compris, ce terme à toutes les sauces, et souvent de manière péjorative. Toutefois, il est temps de remettre les pendules à l’heure et de se mettre d’accord sur la définition à donner.
Dans son sens le plus global, d’après le Larousse, l’élitisme est « une attitude ou politique visant à former et à sélectionner les meilleurs éléments d’un groupe sur le plan des aptitudes intellectuelles ou physiques, aux dépens de la masse ». En soi, il n’y a rien de mauvais là-dedans, tant que les critères sont objectifs et justes. Je connais plusieurs personnes qui comprennent et usent de ce terme de cette façon. Certaines appartiennent même à l’élite, je peux comprendre par conséquent pourquoi elles se sentent blessées par le terme « élitiste » quand il est utilisé de manière négative.
J’ignore si c’est le cas de beaucoup de personnes, mais moi, je me réfère à une autre définition.
L’élitisme, c’est aussi cela : une idéologie qui soutient l’accession au pouvoir de personnes jugées comme « les meilleures », comme « supérieures » ; et qui réciproquement considère le peuple comme inférieur, et en conséquence devant être gouverné par l’élite (merci wikipédia et en partie l’Internaute qui, lui, donne aussi la définition 1).
Il y a bien sûr l’élitisme méritocratique, ou méritocratie : le fait de récompenser les personnes et les hisser en haut du panier selon leurs actes, compétences, etc. J’en parlais avec Julie Animithra, unæ autre mutu sur Twitter.
De mon côté, quand je reproche le fait « d’être élitiste », je cible l’idéologie, donc la définition que donne Wikipédia.
Faire partie de l’élite n’est pas toujours un choix, et en soi, ce n’est pas un mal. Reste à définir ce qu’est l’élite et sur quels critères elle est basée, mais ce n’est pas le sujet.
Faire partie de l’élite ne fait pas de toi une mauvaise personne.
Faire partie du peuple ouvrier ne fait pas de toi une personne sans éducation.
C’est bon ? L’habit ne fait pas le moine, tout ça, tout ça.
Se montrer élitiste, à mes yeux, ce n’est pas forcément faire partie de l’élite, d’ailleurs. Eh oui.
Il y a eu moult exemples dans ma vie, où des personnes issues de mon milieu ou d’autres aussi précaires pouvaient faire preuve d’élitisme. Dans le sens 2, s’entend. Fières d’avoir pu se hisser hors de la fange, de s’être cultivées, ces personnes se sont mises à mépriser autrui et à oublier d’où elles viennent, à reproduire un comportement qu’elles ont pourtant subi lorsqu’elles n’étaient que de « simples ignorantes ». Je grossis le trait, mais vous voyez où je veux en venir maintenant.
Pour être encore plus vulgaire, se comporter de la sorte, c’est « péter plus haut que son cul ».
C’est avoir le melon.
Bien sûr, il y a des personnes faisant partie de l’élite qui sont aussi comme cela. En clair, il y a des cons partout. Cependant, pour moi, être élitiste, c’est avant tout décider que x personnes sont inférieures et y personnes sont supérieures. C’est prendre plaisir à rabaisser les personnes dites inférieures. En cela, c’est se montrer condescendant, méprisant, et j’en passe. Bien entendu, le fait de faire partie de l’élite n’a rien à voir avec le fait d’être condescendant, méprisant.
Élite ≠ élitisme.
Pour en revenir à l’élitisme que moi je dénonce, j’en profite pour pousser une gueulante contre celleux que j’appelle « grammar-nazis ». Ces sacro-saints défenseureuses de la Langue française, préparæs à traquer la moindre coquille, allergiques aux « fôtes » au point d’en oublier la courtoisie, la politesse, le respect, quand iels le signalent aux « fauteureuses ».
Les allergiques à l’écriture inclusive et/ou neutre, abreuvez-moi de vos attaques ad personam, vos syllogismes, vos hommes de paille, j’ai faim. La pyramide de Graham vous attend.
Je sais très bien qu’à ce stade de mon article, certaines personnes ont décroché parce que j’ai sciemment employé l’écriture inclusive. En même temps, elle m’a servi à bien souligner mon propos, vous ne trouvez pas ? Après tout, les élitistes (deuxième définition, ne vous perdez pas) ont manqué faire une crise cardiaque quand « iel » est entré dans le dictionnaire. Revenons à nos moutons – pardon, notre Langue française.
À partir du moment où l’on ne vous en a pas fait expressément la demande, vous n’avez pas à relever les erreurs d’orthographe, de grammaire, de conjugaison, de vocabulaire, de syntaxe… en public ou en privé. C’est comme les commentaires sur le physique ou la tenue des gens. On est en 2022, et il faut encore expliquer (fatigue) ce que sont le savoir-vivre et le savoir-être, à des personnes qui se jugent supérieures ! Donnez l’exemple pour commencer.
De même, attaquer quelqu’un sur son français plutôt que sur le fond de ses propos, ce n’est pas argumenter. Si vous me répondez que « Quand même, il y a un minimum, et que ce soit dans un français acceptable », déjà pour commencer, pourquoi perdre votre précieux temps avec quelqu’un que de toute manière, vous méprisez ? Si ce n’est l’ennui, la méchanceté, la bêtise, je ne vois pas ce qui vous motive.
Lâcher des piques sur le français de quelqu’un tout comme sur son physique, sa façon de s’habiller, ses goûts personnels, ses potentiels problèmes, c’est lamentable. C’est minable. Fort-fort minable, oui.
Au-delà du fait que la personne en face de vous est peut-être dys ou souffre d’autres problèmes, cela ne se fait pas. C’est tout. Si vous me sortez la carte de la franchise, vous confondez encore avec la méchanceté. Être franc, ce n’est pas ça. Il n’y a aucune hypocrisie à respecter autrui, en fait.
Le mot élitisme a un autre point commun avec d’autres mots comme ego, riche, égoïsme, colère. Son sens péjoratif ressort en premier. J’expliquais d’ailleurs aussi qu’être égoïste de nature n’avait rien à voir avec faire preuve d’égoïsme de temps en temps pour se recentrer et penser un peu à soi. Être riche, être triste, en colère, avoir de l’ego, et j’en passe, sont en soi des faits. Ce n’est pas mauvais.
Après ce laïus, il me semble nécessaire désormais d’être vraiment précise quand je qualifie quelque chose d’élitiste. Ce doit être la deuxième définition qui devra être automatiquement comprise. Je sais que le contexte normalement doit aider. Après, comme je suis quelqu’un de maladroit, impulsif, et qu’à l’écrit les quiproquos peuvent survenir plus facilement…
« Syndrome d’élitisme », peut-être ? Honnêtement, je donne ma langue au chat. Si vous avez de meilleures suggestions, je suis preneuse.
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