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La psychophobie systémique

[TW psychophobie et tout le tralala, vous savez à quoi vous attendre]

On entend souvent parler de « racisme systémique », du moins, de plus en plus. De mon côté, j’aimerais aborder non pas cela, car des concernæs le font bien mieux que moi, mais la psychophobie systémique.

Oooooh, du systémique par ci, et du systémique par là…

Avant de soupirer, s’il vous plaît, laissez-moi m’expliquer.

Tout comme le racisme, nous avons souvent des paroles et mots malheureux concernant la maladie, la psychiatrie, etc. Mais si, vous les utilisez tous les jours, sans vous rendre compte. Bon, je vous donne quelques exemples :

« Iel est unæ malade mental.e pour avoir fait ça. »

« L’autre fou/folle, là… »

« Bande de taræs/d’attardæs, etc. »

« T’es cinglæ/débile/etc. »

« Mais la dinguerie, là ! » (puisque dérivé du mot « dingue »)

« Regarde-læ, iel fait l’autiste/le trisomique. »

Vous allez sans doute me dire : « Non, mais c’est dans le langage courant maintenant, et on n’a rien contre les « vraies » personnes folles, malades, etc. »

Le problème, c’est que ce soit aussi banalisé, justement, que ce soit autant ancré dans notre langage, tout comme les mots racistes, les mots putophobes, sexistes… C’est ce qu’on appelle la psychophobie systémique (le fait d’utiliser autant de termes psychiatriques de cette façon).

La psychophobie, j’en rappelle la définition : c’est une forme de discrimination envers les personnes qui souffrent d’un trouble psychique, mental.

Cette psychophobie est systémique aussi quand vous dénoncez les actes de quelqu’un à travers ses troubles psys/sa maladie/son handicap. Alors, on peut donner un contexte, expliquer que la personne a ceci ou cela ; je l’ai fait quand j’ai raconté certaines situations complexes dans mon recueil Vis ma vie en tant qu’aide à domicile, sans pour autant mettre en avant les dits troubles. Au contraire…

Bon, je ne suis peut-être pas très claire. Je vais donc expliciter sous forme d’un exemple :

« Mme F souffre de troubles cognitifs, a Alzheimer. Il s’est passé ceci ou cela, Mme a frappé une de mes collègues. »

Là, on est dans le constat pur et dur.

« Mme F est complètement cinglée et a frappé une de mes collègues. »

Là, la phrase est psychophobe.

« Mme F a frappé ma collègue, mais il faut lui pardonner, c’est parce qu’elle a Alzheimer. »

D’un point de vue médical, les personnes souffrant d’Alzheimer ont des comportements agressifs, il y a effectivement une explication. Par contre, il y a un léger côté psychophobe, bien que très insidieux. Tout mettre sur le dos de la maladie pour excuser un comportement, ce n’est pas sain. Ce n’est pas un token d’immunité (le fait de se réfugier derrière). C’est comme si l’on devait excuser unæ tueuxe parce qu’iel a eu une enfance difficile…

En fait, il faut bien faire la part des choses, et cela commence avec la manière dont on analyse le tout.

Sur Twitter, j’ai expliqué une fois avoir subi un comportement agressif d’un homme dans la rue. J’ai juste expliqué ce qu’il s’était passé, sans faire d’hypothèses ou quoi que ce soit. Il n’y avait pas besoin de contexte. Une personne a commenté (bon, ce n’était pas la seule) en disant que l’homme avait sans doute un problème psychiatrique, qu’il « n’était pas tout là ». Gentiment, sans l’accuser de quoi que ce soit, j’ai simplement dit que de mon côté, je ne faisais aucune hypothèse de ce genre, pour ne pas être psychophobe, et que de toute façon, ça n’excusait absolument pas son comportement (le fameux token d’immunité). La personne s’est énervée contre moi en disant : « On ne peut plus rien dire », « Faut arrêter d’accuser les gens de psychophobie pour tout et n’importe quoi », et elle m’a bloquée.

Oui, cela me marque encore cette histoire. À aucun moment, je n’ai pointé du doigt ses propos, mais elle a tout pris pour elle… Les autres personnes, qui avaient eu des propos psychophobes sans le vouloir, ont compris où je voulais en venir et se sont excusæs. C’est quelque chose qu’il faut absolument arrêter de faire (avoir ces propos psychophobes, s’entend).

Quand je veux insulter quelqu’un, je fais tout pour ne pas utiliser de termes psychiatriques. Cela stigmatise, même de manière indirecte, les personnes malades psy, ou physiques, handicapées, etc. Je ne parlerai même pas du terme « Mongol », qui se double de racisme en plus (ben oui, les Mongols sont un peuple à la base…).

Par exemple, au lieu de dire « dinguerie », j’ai trouvé le terme « flinguerie » (merci à Julie et Ame d’ailleurs de me l’avoir fait découvrir). Y a moyen d’avoir de l’inventivité côté insultes. Bon, vous allez me dire : « Ouais, mais ça commence à devenir dur là. On ne peut plus dire des mots racismes, homophobes, sexistes, psychophobes, spécistes… il reste quoi à la fin ? »

Voilà pourquoi je pointe le système du doigt.

Il reste les mots orduriers autour du pipi-caca. Après, je suis sûre que votre créativité ne va pas mourir si vous essayez d’inventer des insultes originales. Des insultes qui désignent vraiment l’individu qui a attiré vos foudres pour ce qu’il est. Non, Jean-Michel Premier n’est pas un « psychopathe », mais juste un blanc-bec protozoaire. Non, Mireille Trois n’est absolument pas une « hystérique mal baisée », mais une casse-gonades rouillée. Bon, là, je ne me suis pas foulée, vous pouvez faire mieux que moi :).

Autre exemple qui montre à quel point la maladie, les handicaps sont vraiment mal perçus : lorsqu’on souhaite à quelqu’un de tomber malade/d’avoir un accident qui le rend handicapæ, etc. Et je ne parle pas du cas de « Je te souhaite ça pour que tu comprennes ce que c’est » quand l’autre a fait une remarque déplacée (genre, la dépression). Depuis toujours, ça me met ultra mal à l’aise, en fait. Pour dire les termes, ça me « trigger ».

[TW mort]

Alors je ne vais pas jouer la sainte en disant que je n’ai jamais eu ce comportement-là (souhaiter à quelqu’un de tomber malade, d’être handicapæ, etc.). Sauf que là, dans ce cas de figure, quand j’étais plus jeune, je cherchais surtout à rentrer dans le moule, à me faire oublier, à être acceptée par les autres… donc à reproduire des comportements vraiment pas safes. Au-delà de la psychophobie, de la handiphobie, je trouve qu’avoir ce genre de parole, de souhait, c’est… Je vais peut-être choquer, mais je préfère « à la limite » qu’on souhaite la mort de quelqu’un. Même si ça me trigger aussi. Bon, je suis un peu confuse dans mes propos, et je m’excuse si je suis offensante, ce n’était pas voulu.

Voici un lien où il y a quelques bonnes idées d’insultes (même si pour certaines, elles ne devraient pas figurer dans la liste, car psychophobes, comme « crétin », mais bon…) : 100 alternatives aux insultes sexistes, homophobes, etc.

Cet article n’est pas là pour révolutionner le monde, je tenais juste à exprimer mon avis et, peut-être, vous faire réfléchir sur la question.

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