« C’était mieux avant » : cette phrase, vous l’avez déjà entendue ; que ce soit pour parler de la musique actuelle, de l’éducation prodiguée à nos enfants, de ce qui est vendu dans les supermarchés… En fait, cette phrase « convient » pour quasiment tous les sujets. C’est une forme de conclusion après un court ou long échange. Parfois, ce dernier est même avorté : servi en début de débat, elle fait mouche, elle a l’art de le clore de manière neutre… en apparence.
Sans nous mentir : vous, lecteurices, vous l’avez déjà sortie. Moi aussi, je l’avoue avec humilité. Il y a quelques années, c’était dans un moment de forte émotion, et cela concernait nos moyens de communication, nos interactions avec les autres. Oui, mais voilà : c’était sous le coup de l’émotion. Certaines personnes pensent, mangent, écrivent, disent cette phrase comme si elles annonçaient la météo du lendemain. Alors ce n’est peut-être pas à longueur de temps, mais… zut.
J’en parle un peu dans La technologie met-elle la communication en danger ? et Les RS, Règne du Surmoi ou Régression du Singe
« C’était mieux avant »… Non, je ne vais pas vous resservir le « Vous ne pouvez pas comparer l’époque actuelle avec celles des années quatre-vingt-dix/soixante/cellesquevousvoulez ». C’est assez évident, mais je pense que vous vous en tapez un peu. Mouais. Dans votre tête, si vous avez décidæ d’être fixæ sur cette idée, alors vous le resterez. J’en fais peut-être sourire certain.e.s – du moins, celleux qui ont poursuivi leur lecture – mais avouez que souvent, cela marche comme ça, non ?
Par contre, avez-vous déjà pensé que le « C’était mieux avant. » sous-entend non seulement que ce qu’il se fait de nos jours, c’est moins bon… mais qu’en plus, il transporte l’idée sous-jacente qu’il sera difficile de faire mieux ? Que de toute façon, c’est… couru d’avance que le futur réserve des choses de moins en moins bonnes/agréables/merveilleuses ? C’est un peu horrible comme pensée, non ? Pourquoi cela ?
J’en tire la conclusion suivante : on ne laisse aucune chance aux générations actuelles et futures de rectifier le tir, ou de créer quelque chose de mieux. Ai-je l’air d’exagérer ? Non : à la base, ce n’est pas moi qui condamne, mais vous. Je veux croire en l’être humain. Il y a des hauts et des bas, et pour moi, nous avons trop tendance à couper l’herbe sous le pied des générations actuelles… et celles à venir.
Exemple tout bête qui illustre mes propos : la littérature fantasy. Elle a commencé avec… les odes, dans l’Antiquité. Ne me prenez pas pour une idiote, je sais ce que je dis. Que racontent les odes ? Les mythes, leur essence. La vie des dieux, des chimères et des hommes. Veuillez me pardonner mon insistance, mais il me semble que c’est du domaine du merveilleux… et du fantastique aussi, à certains égards. Revenons donc à nos moutons. Pardon : à nos chimères.
La littérature dite « fantasy » est un genre très mal cerné. Beaucoup la connaissent avec Tolkien, qui peut être considéré comme un pionnier. Lui, tout comme d’autres auteurices, ont puisé leur inspiration dans… la mythologie, les légendes de leur pays natal ou d’autres. Eh oui. Eh eh. Pourquoi suis-je en train de rire ?
Ces auteurices-là ne s’en sont jamais caché. Pourtant, certaines personnes sont parvenues à les accuser de plagiat. Je ne ressortirai pas qu’à l’heure actuelle, il n’est plus possible de créer quelque chose de toutes pièces. À vrai dire, j’ignore si depuis l’Antiquité, il ne s’agit pas d’un axiome – mais tout est relatif… La seule chose que j’ai envie de vous demander, c’est si vous cernez bien la définition de « plagiat ». Commencez déjà par là.
Ces auteurices se sont tous inspiræs quasiment des mythes, des légendes, du folklore local, national… que sais-je. Même les auteurices d’aujourd’hui, eh ! Iels n’ont fait que suivre la voie de leurs aînæs. Mais quoi ? « C’était mieux avant… » Avant quoi, à la fin ? Avant l’Antiquité ? Quel non sens… Tssss ! Hein, ces auteurices-là ont plagié ? Non, attendez une minute : ne se sont-iels pas plutôt inspiræs de ce qui existait avant ? Ah ben si, il y a quand même une nuance entre ces deux termes ! « S’inspirer, ce n’est pas créer. » Ben… L’inspiration, c’est un peu la base de la création, non ?
S’inspirer signifie « s’appuyer sur ce qui a existé avant », et même pour l’imagination c’est valable. Il y a une partie de celle-ci qui est incomprise, mais on est tout.e.s d’accord pour dire que pour nous imaginer quelque chose, nous partons de quelque chose – aïe ! ça fait beaucoup de « quelque chose », m’enfin » qui existe déjà… non ?
J’aurais pu prendre l’exemple de ce qui est vendu dans les supermarchés, pour rire un peu. Ah, je m’y attèle, allez. La création de ces derniers remonte auuuuuuuux… années trente, si mes souvenirs de mes cours d’histoire contemporaine sont bons. La disposition des infrastructures, des rayons, le choix des achalandages n’était pas le même qu’aujourd’hui. La composition de certains produits aussi.
Nous avons évolué vers plus de confort, de praticité, d’accessibilité, même si pour ce dernier point, ce n’est pas toujours au point. Bon, je ne parle pas de la problématique des multinationales, des gouvernements et compagnie, qui profitent bien… Je désire juste poser une question : C’était mieux avant les supermarchés ? Ne me faites pas croire que c’est le cas, ou alors, vous êtes une personne valide et privilégiée. Voilà, je n’irai pas plus loin. Je vous renvoie à mon article Je suis odieuse et j’accuse, où je suis vraiment très méchante (oups).
« C’était mieux avant. » : une phrase toute faite qui est bien vide de sens… et finalement, n’est-ce pas vivre dans le passé ? Il est impossible de revenir en arrière. Par contre, nous pouvons toujours choisir de prendre telle voie, même si ce ne sera pas grâce à nos dirigeant.e.s.