La pièce de linge fatale

[TW agression physique, insultes, sur ma personne]

Durant l’été 2019, je suis allée durant un week-end en remplacement chez un couple, Mr et Mme D, qui devait être placé en EHPAD la semaine suivante.

On m’avait donné quelques éléments sur leurs pathologies, les habitudes à avoir. Cependant, il y a des choses que j’ai apprises seulement en lisant le cahier de transmission. Comme le fait que Mme D avait été agressive envers plusieurs intervenantes. Sur le coup, je me suis dit que le week-end pourrait se passer sans trop de casse si je faisais attention. J’y allais le matin, le midi, et le soir.

Que nenni.

Lorsque je suis arrivée le samedi matin, l’intervention a été tendue. Tout d’abord, Mr et Mme D n’avaient pas été prévenus pour le remplacement. Mr D était souvent derrière moi à angoisser parce qu’il avait peur que je n’arrive pas à m’occuper de sa femme, et il n’a pas voulu prendre de douche. Forcément, j’ai perdu du temps à le calmer, le rassurer, puis j’ai perdu du temps à lui demander de me laisser travailler. Sa douche, je lui ai faite le lendemain.

Samedi midi, rien à signaler de particulier.

Samedi soir arrive. Mme D a demandé à aller aux toilettes… J’ai dû la laisser 3/4 d’h, au moins, pour 1h d’intervention. J’ai dépassé d’1/4 d’heure. Je devais réchauffer le repas, mettre en tenue de nuit Mr et Mme D, la toilette intime pour elle, la coucher… Si j’ai pu avancer certaines tâches pendant qu’elle était aux toilettes, il y en a d’autres où c’était impossible. Sur la fin de l’intervention, je chantais des chansons avec elle, cela s’est bien terminé.

Restait dimanche.

Le matin, rien à signaler. J’ai donné la douche à Mr D, le bain à Mme D, petit déjeuner, et voilà. Puis le midi… la situation a tourné au vinaigre. Après avoir emmené Mme D aux toilettes, comme elle n’aime pas qu’on reste plantés là à la regarder, j’ai avancé sur certaines tâches : vaisselle, linge… Elle a commencé à s’énerver parce que son mari me posait des questions, et à me dire à moi que je ne devais pas dire ce qu’il se faisait ici. J’avais beau tout faire pour ne pas la contrarier, elle comprenait tout de travers. Je ne donnais pas suite, je ne répondais plus aux questions de Mr D. Puis j’ai réussi à sortir Mme D des toilettes.

Pour la faire marcher, je me suis placée face à elle et je lui ai tenu les mains. Pendant qu’elle avançait, je reculais. Elle n’a pas voulu retourner au salon et m’a fait l’emmener dans la pièce du linge (son ancienne chambre). Je ne l’ai pas contrariée. C’était l’heure de mon départ, mais j’ai accédé à sa demande. On discutait de banalités, puis une fois qu’on s’est retrouvées au fond de la pièce, vers la fenêtre…

Son regard a changé, sa voix également. Ses mains se sont resserrées autour de mes poignets. J’ai compris qu’elle n’était plus tout à fait elle-même et que je faisais face, potentiellement, à une crise de démence. Comme je ne suis pas médecin, je n’affirme rien.

Dans la pièce, il n’y avait rien pour l’asseoir, pour sa sécurité, je ne pouvais pas m’éloigner d’elle par conséquent sans la faire tomber. Elle a alors tenté de me frapper au visage alors que je la tenais toujours. J’ai eu droit à des pitchenettes. J’ai eu droit au tutoiement, à des insultes (du style,  » espèce de vache », « sale punaise »…). Rien, mais absolument rien ne pouvait la calmer.

Son mari est venu voir ce qu’il se passait. Il est venu m’aider, et heureusement. Nous l’avons ramenée tant bien que mal au salon. Elle n’arrêtait pas de dire que son mari m’avait retournée contre elle.

J’ai appelé l’astreinte, j’ai expliqué, j’ai exercé mon droit de retrait en disant que je n’y retournerais pas le soir. Le lundi, j’ai rempli une fiche d’événement indésirable.

C’est une situation à laquelle nous pouvons malheureusement être confrontæ en tant que personne faisant partie du personnel de santé.