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Coupable d’exister

Exister… et être coupable ?

Article écrit en 2018 et remis au goût du jour, avec des ajouts entre parenthèses, comme d’habitude. Cet article est un prélude à d’autres, que j’ai rédigés avant et après : pourquoi le regard des autres me paralyse, mes écrits, entre rêves et traumas, légitimer le sentiment de blessure d’autrui, traumatismes : mécanismes complexes et multiformes, perfection de soi et l’Idéalisation d’autrui, pour ne citer que ceux-là.

J’ai cherché un autre titre que celui-ci pour ne pas induire en erreur sur le sujet de mon article, mais rien d’autre ne me vient. Je vous demande de lire jusqu’au bout et de comprendre pourquoi j’emploie un terme aussi fort, tout en vous rassurant : aujourd’hui, je vais bien (update : nous sommes en mai 2023, et je ne peux pas affirmer que je vais bien, même s’il y a pire. ahah).

Je me disais qu’il serait bien que j’essaie de vous expliquer certaines de mes réactions face à une situation précise, que je vais dévoiler plus loin. Souvent, elles surprennent. On ne m’a jamais dit qu’elles frôlaient l’impolitesse, mais je ne serais pas surprise que l’on y ait déjà songé.

Vous venez d’offrir un cadeau à une personne, ou de la complimenter. Vous voyez cette personne être mal à l’aise, commencer à dire qu’il ne fallait pas, parfois paniquer…

Cette personne, c’est moi. C’est peut-être vous aussi.

À celles et ceux qui ne comprennent pas, je vais essayer d’expliquer ce qu’il se passe.

Je pense que vous connaissez tous les termes de légitimité, syndrome de l’imposteurice, etc. Sans surprise, je suis concernée. Je ne suis pas née avec, cela s’est développé dès mon enfance à cause d’un ensemble de facteurs. Prière de ne pas juger ni de soupirer. Je ne me plains pas, j’établis des constats. Là, je viens de me justifier alors que je ne le devrais pas, parce que c’est devenu automatique. Il s’agit d’une autre conséquence de ce qui me touche. Je travaille à me débarrasser de cette habitude.

J’ai grandi avec des blessures que je panse encore aujourd’hui (et c’est encore le cas en 2023, youpiiiii).

J’ai grandi avec des idées destructrices que l’on m’a implantées dans le crâne. Je lutte très fort contre elles aujourd’hui, mais je reste humaine, alors il m’arrive de flancher. Quelles sont ces idées ?

– Pour être heureuxe, il faut obligatoirement souffrir.

– Au lieu de perdre mon temps à jouer/lire/faire ce qui me plaît, je devrais plutôt travailler. C’est être paresseuxe. Et les paresseuxes, ce sont des assistæs qui finissent à la rue.

– À force de rêver/être dans la lune, on finit abandonnæ.

– Les loisirs, les arts, les passions n’apportent rien et ne permettent pas de gagner notre vie.

– Si tu n’y arrives pas, c’est que tu n’as pas fourni assez d’efforts (et ça va de pair avec l’idée que si l’on fait un break/s’offre un moment de loisir/se fait un cadeau personnel, c’est mal et c’est du temps de perdu).

– Pense aux autres, tout ne tourne pas autour de toi. Dites ça à une personne qui justement passe son temps à aider tout le monde, à écouter, à être empathique… et à être hypersensible. Vous pouvez vous assurer qu’elle finira par croire que finalement elle est égoïste/égocentrique, qu’elle n’est bonne à rien.

– Pleurer, c’est pour les bébés/les enfants/les faibles.

– Si tu as réussi, c’est parce qu’il a fallu qu’on te pousse au cul (donc en gros, aucun mérite personnel).

– Tu ne trompes personne, je sais qui tu es en réalité (…).

Le pire est que ces façons de penser m’ont été infligées majoritairement par des personnes destructrices : mon géniteur, mon ex beau-père, mon ex-professeur de chant, mes harceleuxes…

Cette forte culpabilité qui me saisit à la gorge lorsque pour une fois, je pense à moi, ça aussi c’est lié. Ma peur des autres, mon anxiété sociale qui fait tant rire les oppresseuxes, qui prétextent que ça n’existe pas, elle en découle aussi. C’est un CONSTAT. Je le marque en majuscules pour le hurler parce que ça fait du bien.

Je ne me vois plus comme une victime. Parce que la colère gronde, parce que mon moi intérieur (mes différents « je ») se révolte, même si personne ne voit rien. Ce n’est pas parce que j’expose mes maux que je me lamente. En fait, pour ne rien cacher, je me suis toujours tue parce que, autre idée qu’on m’a fourrée dans la tête, c’est mal, c’est nul. Non, il faut crever l’abcès. Je sais que celleux qui veulent me nuire chercheront à me faire taire, mais c’est fini.

(Je suis encore plus véner sur la question en 2023. D’ailleurs, je vous renvoie avec plaisir à mon article Je suis odieuse et j’accuse.)

Vous savez, paradoxalement, chaque fois que j’ai connu une situation difficile et que j’étais au bord de la rupture, mon instinct a toujours su tirer une sonnette d’alarme en moi pour me pousser à mordre (ce n’était pas mon instinct, c’étaient mes alters… deux en particulier). J’aimerais à l’avenir ne plus employer ce mécanisme (c’est raté, ça m’est encore arrivé récemment) et contrer toute nuisance sur ma personne dès le départ. J’y travaille, parce que ça devient vital pour moi (finalement, comprendre que je suis potentiellement multiple et apprendre à vivre avec, c’est plus efficace). Il s’agit d’un moyen pour moi d’avoir le droit d’exister.

C’est fort comme terme, n’est-ce pas ?

Celles et ceux qui pensent que je cherche à me faire plaindre, passez votre chemin. C’est à cause d’individus d’une trempe similaire à la vôtre si j’en suis là aujourd’hui, si je me bats tous les jours contre moi-même. Aux autres, ne vous vexez pas si j’ai une « mauvaise » réaction face aux cadeaux, à l’aide que l’on peut m’offrir, aux compliments. Ce n’est pas facile pour moi de me dire que c’est normal. Ne vous énervez pas non plus, ça ne sert à rien.

Accepter la différence, c’est aussi ça. D’ailleurs, à ce propos, je me rends compte que je ne suis pas si tolérante que ça, puisque pour me sentir bien, pour simplement vivre, j’écarte les personnes qui me nuisent. J’en viens à me poser la question si je suis ouverte d’esprit (rire jaune).

Le chemin est encore long, mais j’y arriverai.

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